Note de jurisprudence – Le directeur n’a pas la compétence pour déterminer le loyer et les charges mensuelles du logement concédé pour utilité de service (à propos des arrêts CAA de Marseille du 3 février 2022, n°20MA02499 et n°21MA01891)

Catégorie : Droits des patients, exercice professionnel, responsabilité
Date : 30/05/2022

Laurette Vilard, juriste, apprentie du centre de droit JuriSanté du CNEH

Ces deux arrêts illustrent la délimitation des compétences pour déterminer le loyer et les charges mensuelles du logement concédé pour utilité de service. Il s’agit de distinguer les compétences respectives du directeur et du conseil de surveillance concernant le logement donné à un agent pour utilité publique.

Les faits sont les suivants : M. A a été engagé en qualité d’animateur principal au centre hospitalier de Ponteils, le 1er avril 2014. Dès son recrutement, il s’est vu octroyer une chambre meublée au sein du pavillon du personnel de cet établissement. Cependant, par une décision du 10 août 2017, le directeur du centre hospitalier a décidé de lui appliquer une redevance mensuelle de 70 euros en contrepartie de l’attribution de ce logement. Il a émis, en conséquence, des titres exécutoires à l’encontre de l’animateur à compter du 1er septembre 2017.

Dans un premier temps, le juge administratif s’interroge sur la compétence du directeur à déterminer le loyer et les charges mensuelles du logement concédé pour utilité de service.

Le décret n° 2010-30 du 8 janvier 2010 pris en application de l’article 77 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière prévoit dans son article premier que les établissements publics de santé peuvent attribuer des concessions de logement par nécessité absolue de service à certains fonctionnaires.

Le centre hospitalier de Ponteils faisait face lors de l’emploi de M. A à des difficultés de recrutement, conduisant le centre à proposer des chambres meublées aux nouveaux arrivés afin de faciliter l’embauche d’agents. C’est donc de bon droit, selon le juge, que l’attribution du logement de M. A peut-être regardée d’utilité de service.

De plus, l’article 9 du décret précité, pose la compétence d’attribution du directeur d’un établissement de santé de pouvoir choisir les catégories d’agents pouvant accéder aux logements concédés par utilité de service.

Cependant, l’article se poursuit en disposant que « les fonctionnaires ainsi logés sont tenus de rembourser à l’établissement un loyer et des charges mensuels déterminés par l’assemblée délibérante ». Dès lors, la seule autorité compétente afin de fixer l’attribution d’une redevance annuelle aux agents étant logés dans un logement pour utilité de service est l’assemblée délibérante, c’est-à-dire le conseil de surveillance (CS). Le CS peut donc déterminer le montant du loyer et les charges mensuelles :

  • Soit sur la base d’un forfait déterminé en fonction du niveau de rémunération des bénéficiaires et par référence au plafond mensuel de la sécurité sociale ;
  • Soit d’après la valeur locative servant de base à la taxe d’habitation ou, le cas échéant, d’après la valeur locative réelle.

Dans un second temps le juge administratif en tire les conséquences pour la décision portant titres exécutoires émise par le directeur à l’encontre de l’agent.

Le second arrêt précise que « l’annulation pour excès de pouvoir d’un acte administratif, qu’il soit ou non règlementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusion recevables, l’annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives ». En l’espèce, le directeur n’ayant pas les compétences pour ordonner l’application d’une redevance mensuelle à l’un de ces agents ayant un logement concédé pour utilité de service, les décisions portant titre exécutoire ne peuvent qu’être annulées.

Article 9, décret n°2010-30 du 8 janvier 2010 pris en application de l’article 77 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant disposition statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.