Note – Les dessous de la réforme du droit des autorisations

Catégorie : Organisation sanitaire et médico-sociale
Date : 19/04/2021

Marine Gey-Coué, juriste, consultante au centre de droit JuriSanté du CNEH

Depuis la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, une réforme sur le droit des autorisations circule dans les couloirs du ministère :

  • L’ordonnance du 3 janvier 2018 et le décret du 19 février 2018 avaient pour objectif de simplifier et moderniser les régimes d’autorisation des activités de soins et d’équipements matériels lourds, mais ont accouché de mesures finalement limitées : allongement de la durée des autorisations (passage à 7 ans), réforme des visites de conformité, lien entre la décision d’autorisation et la procédure de certification, etc.
  • Le gros de la réforme s’appuyait sur des travaux ministériels visant à modifier les différentes conditions techniques de fonctionnement des 18 activités et des 5 équipements soumis à autorisation. Une dizaine de groupes de travail associant les ARS, les fédérations hospitalières, les sociétés savantes, les professionnels de santé, la HAS et l’Assurance-maladie avaient commencé à se réunir pour des travaux à mener sur 3 ans (de 2018 à mi-2020) afin d’aboutir à autant de décrets d’autorisation que d’activités et d’équipements.
  • Les enjeux de cette réforme sont conformes à ceux de « Ma santé 2022 » :
    1. Améliorer la qualité et la sécurité des prises en charge (normes de structures minimales, règles de prises en charge et de parcours, démarche qualité et gestion des risques) ;
    2. Territorialiser l’offre en lien avec les mouvements de coopération entre acteurs (promouvoir une approche territoriale de l’offre, encourager le « faire ensemble ») ;
    3. Introduire l’innovation en santé au service des patients (nouvelles techniques, technologies, stratégies thérapeutiques, nouvelles pratiques, notamment ambulatoires).

A notre connaissance, ces travaux sont au point mort depuis 2 ans…

… et pourtant, le sujet reste d’actualité sur le terrain : le rapport Claris, la crise sanitaire et le Ségur de la santé ont rappelé l’intérêt de simplifier les procédures administratives, notamment celles des autorisations sanitaires.

La loi de santé du 24 juillet 2019 avait d’ailleurs déjà réamorcé la réforme dans son article 36 en autorisant à nouveau le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour davantage prendre en compte les exigences de qualité et de technicité des soins, la répartition territoriale de l’offre de soins et la gradation des soins dans les conditions d’autorisation.

Un projet d’ordonnance et un projet de décret modifiant le régime des autorisations sont donc en cours de discussion. Il y est notamment évoqué :

  • Une simplification de la procédure de renouvellement et de cession d’autorisation ;
  • La prise en compte des GHT en ajoutant aux pièces des dossiers d’autorisation l’avis du comité stratégique ;
  • La possible co-titularité d’une autorisation entre plusieurs acteurs, c’est-à-dire qu’une autorisation pourrait être délivrée conjointement à plusieurs personnes morales ou physiques, avec responsabilité solidaire (création d’un nouvel article R.6122-26-1 CSP en cours de discussion). Cette co-titularité, si elle est retenue, pourrait amoindrir d’un point de vue stratégique l’intérêt de créer un groupement titulaire d’autorisation (GIE ou GCS), sans pour autant bouleverser les organisations existantes puisque ces entités juridiques pourraient toujours être titulaires d’autorisation. Mais rien ne semble acté pour le moment.
  • Une mise en cohérence des dispositions pour les hôpitaux des armées.

Hormis cette notion de co-titularité (qui n’est pas encore actée), ce projet de décret, loin de bouleverser le droit des autorisations, porte essentiellement un réaménagement de forme et une recodification de quelques articles déjà existants. Rien d’inquiétant à ce stade bien qu’il faille surveiller la publication et surtout le contenu du texte définitif.

Le véritable enjeu de la réforme des autorisations se situe davantage dans les travaux de révision des cahiers des charges des différentes activités sanitaires, si tant est qu’ils reprennent évidement …